alpha_conde_9Alpha Condé a été « réélu au premier tour avec plus de 57% », ce en dépit de son mépris ostensiblement et sans cesse affiché envers le peuple, durant son premier mandat, avec à la clé la violation constante de la constitution, et plusieurs dizaines de morts par balles, abattus par les forces de l’ordre.

Les uns abattus lors de manifestations pacifiques, les autres lors de brutales répressions de paisibles citoyens dans leurs domiciles et les agressions barbares d’inoffensifs villageois qui ne revendiquaient que leurs droits légitimes à bénéficier de richesses naturelles de leur patelin, ce dans leur sommeil en pleine nuit. Si à ce tableau peu reluisant vous ajoutez l’ethnocentrisme érigé en méthode de gouvernement qui met le pays au bord de la guerre civile et de l’implosion, on peut aisément comprendre que cette élection pose problème. Et que la Guinée puisse être considérer comme «une planète à part », en reconduisant Alpha Condé à la tête de l’Etat. Comme si de rien n’était. Mais comme malheureusement il faut le rappeler cela s’est produit dans le bled depuis bientôt une soixantaine d’années.

Si l’on devait s’en tenir aux déclarations de « l’opposition républicaine » ce scrutin devrait être « la fin de la recréation ». C’est-à-dire la fin de la série interrompue des farces électorales en terre guinéenne. Et du même coup être la véritable « première élection démocratique de la Guinée indépendante ». L’opposition le clamait en dépit de la volonté d’Alpha Condé, claironnée dès 2011 et affichée depuis lors par la mise en marche de sa puissante machine de « hold-up électoral ».

Ce scrutin pouvait dans ce cas mettre un terme à la longue série des « rendez-vous manqués » par notre pays depuis l’indépendance. Et représenter certes, non pas LA mais une des conditions, peut-être la première, d’un changement dont la Guinée a tant besoin. Il en a été, hélas tout autrement, du fait, il faut l’avouer, d’abord et avant tout des guinéens. Même si accessoirement, comme l’affirment, quelques guinéens, pas tout à fait à tort, il y a eu, une complicité active de ce qu’il est convenu d’appeler la communauté internationale. Mais il faut le dire et le répéter sans jamais se lasser, que c’est aux guinéens d’abord, et á personne d’autre, de prendre en main leur destin. Et d’apporter le remède au malheur de la Guinée. Personne d’autre ne le fera à notre place. Et j’ajoute, aussi qu’il faut se convaincre que le jour où les guinéens voudront le changement, il aura lieu. Et que rien ni personne ne pourra l’empêcher. Encore faudra-t-il qu’on le veuille réellement.

Mais pour l’instant il ne semble pas que soit cette option qui est à l’ordre du jour dans le landernau politique du pays.

Le « vainqueur » de la présidentielle est, une fois n’est pas coutume, tout miel ! Contrairement aux vitupérations d’antan, il dit tendre la main à ses adversaires. Il se dit et se veut « rassembleur ». Il affirme qu’en 2010 « il n’était pas libre », mais qu’en 2015 « il ne doit rien à personne… mieux qu’il ne la doit qu’au peuple… » C’est donc dire qu’en 2010, Il devait le fauteuil et cette victoire à quelqu’un d’autre. Peut-il nous indiquer ce quelqu’un ? Il avoue « qu’avant il ne connaissait pas la Guinée et les guinéens.» Que n’a-t-il cherché à les connaitre avant de se lancer dans la course à les gouverner ? Il dit à l’avenir ne « promouvoir que les compétences » etc... Comme si précédemment quelqu’un ou quelque chose l’avait obligé à promouvoir la médiocrité ? Pire à ne promouvoir que la Médiocrité, même dans son ethnie, sa famille et son clan ?

Je persiste à penser que l’ouverture et le dialogue qui lui avait été conseillés en 2010 et qu’il avait rejetés, lui aurait été bénéfiques tout autant qu’au pays. C’eut été son honneur et sa chance. Qu’il aura du mal à les mettre en œuvre en 2016, de par sa nature elle-même. Ses actuelles proclamations urbi et orbi n’y changeront rien. Non que quelqu’un ou quelque circonstance l’en empêcherait, en dehors de lui-même. Parce qu’« Il est son pire ennemi » comme l’a dit avec justesse un observateur avisé de la scène politique guinéenne. Pour la Guinée et les guinéens, qu’il est en train de berner, je souhaite de tout cœur me tromper. Quoique j’en doute…

   Veut-il rapprocher ses adversaires pour les endormir ? Les avoir à portée de main pour les neutraliser ? Ou pour les « prochains 19 Janvier 2011» comme Sékou Touré son modèle avait su si bien le faire avec les siens ? Ce n’est pas du tout à exclure, loin s’en faut. Du reste si le temps lui est donné l’avenir à toutes les chances de nous le dire de manière claire et sanglante ? Ou est-ce la mutation qu’il ne cesse de nous annoncer depuis sa réélection ? Peu probable, selon moi à s’en tenir à l’Alpha Condé que l’on connait.

Toujours est-il que l’on se retrouve avec, un paysage politique recomposé. Sinon limpide, tout au moins débarrassé des ambiguïtés et flous artistiques savamment entretenus jusqu’alors. Pour ainsi dire, donc plus clarifié qu’avant. Faut-il s’en féliciter et réjouir ? Wait and see, attendons pour voir disent les Anglais. En effet, avant la campagne déjà, quelques leaders qui n’étaient « opposants » que «par défaut » avaient rejoint la mouvance, c’est à dire la mangeoire. Quelques masques étaient tombés. Avec eux des illusions que, du reste on se faisait presque à volonté. Apres les résultats beaucoup d’autres, pour ne pas dire tous les autres, ont fait de même. Les uns d’une façon qui se voudrait élégante. En « ne se reconnaissant plus dans l’opposition…. ne pas avoir vocation à être opposant éternel….» et, suprême motivation, « avoir en vue dans tout cela, le seul intérêt du pays.» Je voudrai rappeler aux uns et aux autres, que lorsque l’on a des convictions, on se bat pour elles jusqu’à la victoire. Quel que soit le temps mis par celle-ci à venir. Etant entendu que la victoire peut ne pas venir de votre vivant. Je rappelle à tout hasard que seuls les opportunistes changent selon la durée de l’attente. Bref…      

Les autres, par leurs « chaleureuses félicitations à l’heureux élu », qu’ils espèrent, voire rêvent, leur tendre la main. Main si elle était tendue, serait saisie, évidemment «dans l’intérêt supérieur de la nation.» Tout le monde a à la bouche, sans l’avoir à l’esprit cette belle et noble idée derrière laquelle, depuis toujours se cachent les intérêts les plus égoïstes de nos « leaders ». C’est la formule à la mode et à l’honneur dans la Guinée d’aujourd’hui. Tout le monde est devenu « patriote ». Par enchantement !!! L’on s’aperçoit subitement que la nation a un intérêt !!   Dont il convient désormais de tenir compte !!     Tout juste pour pouvoir, encore et toujours satisfaire des intérêts personnels et égoïstes.

Dans la suite implacable de son dessein, (soit se préparer un troisième mandat, soit préparer son fils Mohamed à lui succéder, soit les deux à la fois) Alpha Condé nomme un Premier Ministre. L’heureux élu, un natif de la Basse Cote, pour rester dans la logique du respect de son engagement de 2010 à réserver la Primature à cette région. Et aussi certainement pour conforter sa totale liberté. Mamady Youla un copain et allié de son fils dans les affaires plus particulièrement dans les mines. Encore certainement pour mieux afficher sa volonté de lutter contre les mauvaises habitudes du premier mandat.

Comme on est Guinée, la Guinée de depuis 1958, tout le monde accourt chez le promu pour évidemment le féliciter de manière spontanée et « désintéressée ». On salue naturellement ses « compétences »avec un ensemble ému et touchant. Personne ne songerait à mettre un lien de cause à effet entre les dites compétences et son amitié avec le fils de qui l’on sait. Ce qui ne saurait être que pure mauvaise foi et calomnie.

Bref, les guinéens comme toujours, sont légions à attendre de Mr Youla quelque chose. Je dirai même à attendre de lui des miracles. Tout en ignorant pour certains, ou en faisant semblant d’ignorer pour d’autres, qu’Alpha Condé ne l’a pas nommé pour servir la Guinée mais pour servir SES intérêts à lui. Donc, qu’à supposer que Youla veuille réaliser quelque chose dans l’intérêt du pays, Alpha Condé ne lui en laissera pas le temps. Dans la même veine je rappelle la nomination de Sidiya Touré en 1996 et le même enthousiasme illusionné à l’époque. Je m’étais en son temps fais beaucoup d’ennemis pour avoir dit que Sidya n’avait aucune chance de réussir parce que Conté était le principal obstacle à sa réussite. Je présume, mieux j’affirme (mais je n’en ai cure) que je vais me faire les mêmes ennemis en disant que je n’attends rien de Youla et de son gouvernement tant que Condé sera à la Présidence de la République.              

Elhadj Mamadou Kolon Diallo