La rumeur enflait depuis des semaines. Elle a fini par se concrétiser. Alpha Condé et Bah Oury, le vice-président de l’UFDG, se sont bien rencontrés à Paris dans la journée du samedi 31 octobre 2015.
Bah Oury, accompagné de quelques fidèles, s’est rendu à l’hôtel d’Alpha Condé pour discuter des modalités de son retour en Guinée après quatre ans d’exil en France. Selon toute vraisemblance, Alpha Condé serait disposé à faire le nécessaire pour faciliter ce retour.
Rappelons que Bah Oury a été condamné dans l’affaire du 19 juillet 2011. Il était déchu de ses droits civiques. Il est lieu de se poser la question si Bah Oury recouvrira tous ses droits dans le geste magnanime d’Alpha Condé.
Grâce présidentielle ou amnistie législative?
Sur le plan juridique, la différence n’est pas que sémantique entre «Grâce» et «Amnistie». Elle est de taille selon les explications sur wikipedia : «La grâce présidentielle s'apparente à une suppression ou à une réduction de la sanction pénale. La condamnation reste inscrite au casier judiciaire et diffère ainsi de l'amnistie, qui est étymologiquement un « oubli ». La grâce présidentielle est individuelle. »
Plus loin, on précise : « Il convient de ne pas confondre la grâce, qui n'entraîne que la non-mise à exécution de la peine et qui s'apparente à un « pardon », de l’amnistie, qui efface totalement et à jamais la condamnation et qui entraîne « l'oubli » de la peine. »
Comme on le voit, une grâce présidentielle n’est pas très avantageuse pour Bah Oury. Cela pourrait constituer un frein à ses ambitions politiques. M. Bah, qui ne cache plus sa volonté de prendre la destinée de l’UFDG en lieu et place de Cellou Dalein Diallo, aura du mal à convaincre pour présider le parti s’il a un casier judiciaire souillé.
Donc, l’option la plus intéressante serait l’amnistie. Mais, si la grâce présidentielle est l’apanage du chef de l’Etat, l’amnistie est, quant-à-elle, un acte législatif relevant de la compétence exclusive du Parlement. Autrement dit, Alpha Condé devra soumettre une loi d’amnistie à l’Assemblée et les députés l’approuveront ou la rejetteront.
Dans ce scénario, on est curieux de connaitre ce que voteront les 37 députés de l’UFDG, surtout leur chef de file, Cellou Dalein Diallo. Cette curiosité est aiguisée par plusieurs faits notamment la rivalité de plus en plus publique et grandissante entre Cellou Dalein Diallo et Bah Oury. Aussi, on se rappelle que plusieurs députés de l’UFDG ont refusé d’apposer leurs signatures sur une simple pétition pour une demande de libération des prisonniers politiques. Voteront-ils une loi d’amnistie pour ces mêmes prisonniers politiques ? Wait and see…
A supposer qu’une loi d’amnistie soit votée en faveur de Bah Oury & Co…, une épée de Damoclès planera toujours au-dessus des têtes des amnistiés dont celle du vice-président de l’UFDG. Car, une loi d’amnistie peut conditionner ses effets au respect de certaines obligations par nos fameux «délinquants politiques». Aux moindres écarts, des adversaires politiques n’hésiteront à brandir la menace.
Magnanimité présidentielle ou cynisme politique ?
Les ficelles sont trop grosses pour passer inaperçues. Alpha condé n’est pas tellement magnanime sinon on le saurait déjà. L’indulgence d’Alpha Condé a bien un coût qui risque d’être chèrement payé par l’UFDG. On devine aisément l’idée qui taraude M. Condé. C’est l’implosion de l’UFDG. Alpha veut s’offrir un instant de répit à moindre frais. Pendant que Cellou Dalein Diallo s’occupe de Bah Oury, Alpha Condé dort tranquillement sur son fauteuil présidentiel. Les cinq dernières années d’opposition ont été très usantes pour lui. Tous les moyens sont donc bons pour obtenir la paix en affaiblissant son principal opposant. Le cynisme politique a, incontestablement, prévalu sur tout le reste.
La rencontre entre Alpha Condé et Bah Oury est le signe annonciateur d’une forte tempête. Au retour de ce dernier en Guinée, on saura si la barque de Cellou Dalein Diallo saura résister aux fortes houles.
Aliou Diallo pour www.guinee58.com