aconde_hollande_new«La France n’a pas d’amis. Elle n’a que des intérêts» disait le Général De Gaulle. Il ne pouvait imaginer que ses successeurs appliqueraient à la lettre cette idéologie. Sinon, comment comprendre et justifier la visite de François Hollande à Alpha Condé bien qu’elle soit maquillée par «marquer la solidarité du peuple français à celui de la Guinée face à l’épidémie d’Ebola»?

Tout change, tout évolue et la France-Afrique demeure immuable. Les dirigeants français restent réfractaires aux changements de leur politique africaine. La visite de François Hollande s’inscrit donc dans la vieille tradition de la diplomatie de l’Hexagone : le soutien aux dictateurs africains.

La France adore et cajole les présidents africains souvent mal élus et mal aimés de leurs peuples. Elle s’en raffole même au point d’y perdre toute crédibilité aux yeux de la jeunesse du continent qui ne considère plus la France comme un bon modèle de démocratie à suivre. L’enracinement de la démocratie en Afrique est sa dernière préoccupation diplomatique. La promotion des valeurs humanistes et universelles est son dernier souci dans ses relations bilatérales. Sinon, Alpha Condé, celui qui refuse d’organiser les élections municipales et communales et a tué près de 100 militants de l’opposition, ne peut recevoir les honores d’une France qui se respecte.

Mais, la France aime embrasser les dictateurs à l’acabit d’Alpha Condé pour mieux les étouffer. Elle sait comment manipuler les dirigeants africains. Elle tient toujours par la corde ces présidents impopulaires qui ne doivent leur maintien au pouvoir qu’au soutien cynique de la France. Ainsi, ils lui seront redevables et par la même occasion, corvéables à merci. Ils deviennent des simples roitelets nègres disposés à tous les excès contre leurs peuples pour satisfaire les lubies d’une puissance néo-colonialiste.

C’est le cas d’Alpha Condé qui doit son fauteuil présidentiel aux lobbies parisiens dirigés par un certain Bernard Kouchner. Le bradage du port de Conakry au groupe Bolloré en est une parfaite illustration. Le monopole octroyé à ce groupe ne tient nullement compte des intérêts de la Guinée. Déjà, les dockers ont commencé à payer les conséquences par la perte de leurs emplois. Leurs nombreuses grèves et protestions n’ont pas infléchi la décision d’Alpha Condé.

Ce voyage de François Hollande nous rappelle d’autres visites très controversées et effectuées par d’autres présidents français. Rappelons qu’en décembre 1978, Valéry Giscard d'Estaing rendit visite au sanguinaire Sékou Touré. Les pendaisons publiques, les camps de tortures et de morts, les arrestations arbitraires et les disparitions de citoyens ponctuèrent le règne de Sékou Touré qui assuma fièrement la brutalité de son régime par cette maxime "À complot permanent, terreur permanente!".

Les fantômes des morts qui rodaient dans le ciel guinéen ne dissuadèrent pas Giscard à poser son avion sur le sol ensanglanté de Conakry. Flanqué sur le banc des nations et enfermé dans sa paranoïa, Sékou Touré fut sorti des ténèbres par Giscard. Puisque cette visite permit au «Boucher de Faranah» de redevenir fréquentable.

Giscard poussa l’ignominie en allant jusqu’à interdire en octobre 1976 la publication du livre témoignage «Prison d’Afrique» de Jean Paul Alata. Ce dernier passa cinq ans, de 1971 en 1975, dans le sinistre Camp Boiro. Dès sa libération, il écrivit le livre « Prison d’Afrique» pour relater la barbarie du régime de Sékou Touré.

En septembre 1982, François Mitterrand déroula le tapis rouge à Sékou Touré. Avec un sourire malicieux, Mitterrand reçut Sékou au palais de l’Elysée. Mitterrand n’en eut cure des protestions des veuves françaises dont les maris guinéens étaient lâchement assassinés par  «Ndourou Wembidho». Qui a dit que les droits de l’Homme sont incompatibles avec la diplomatie?

{dmotion}xfdrpl{/dmotion}En juillet 1999, Jacques Chirac n’hésita pas, non plus, à rendre visite à un usurpateur de pouvoir, Lansana Conté qui s’était imposé à la tête de l’Etat guinée après les élections présidentielles très controversées de décembre 1998. Chirac effectua sa visite sans état d’âme pendant qu’un leader politique croupissait en prison sans jugement depuis décembre 1998 (sept mois). Ce prisonnier politique se nommait…Alpha Condé. Quelle ironie de l’histoire!

Cette France-là nous dégoute. Il est temps qu’elle se ressaisisse pour changer sa vision politique africaine au lieu d’entretenir des potentats de la France-Afrique comme Alpha Condé.

Moucky S. Diallo