port de conakryL'opérateur français Necotrans a décidé de mettre un terme au conflit qui l'opposait à Bolloré autour du terminal à conteneurs du port de Conakry. Dans cette longue affaire, Necotrans aura obtenu l’honneur mais pas l’argent.

Le 24 novembre 2016, Necotrans a enterré la hache de guerre. Engagé depuis 2011 dans une bataille juridique contre Bolloré après son éviction du terminal à conteneurs du port de Conakry, le groupe français a accepté de mettre un terme définitif à son différend avec son concurrent.

Et renoncé aussitôt à la procédure d’appel – Bolloré avait été condamné en première instance à verser 2,1 millions d’euros à Necotrans – qui devait se tenir quelques jours plus tard en France, à Versailles. Signée en même temps que la vente des 49 % dans la Société des terminaux de conteneurs du Gabon, la décision est surprenante, étant donné le caractère traumatique de l’épisode guinéen : les employés de Necotrans avaient en effet été évacués du port manu militari, sans aucune forme de préavis…

« C’est moi qui ai poussé pour que l’on transige avec Bolloré, reconnaît Jean-Philippe Gouyet, directeur général de Necotrans, groupe qu’il a rejoint en 2014 après dix années passées chez Airbus. Je voulais que nous sortions de cette histoire. »

L’affaire du port de Conakry, un fiasco juridique ?

Rétrospectivement, pour le groupe et ses avocats (menés par Cédric Fischer), l’affaire du port de Conakry a des airs de fiasco juridique. Après son éviction, le groupe lance plusieurs procédures contre l’État guinéen et contre Bolloré.

En mai 2014, le tribunal arbitral de la Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA) de l’Ohada condamne la Guinée à payer plus de 38 millions d’euros (plus les intérêts) à Necotrans et rejette les accusations de corruption lancées par Conakry contre le groupe français dans le cadre de l’attribution de la concession en 2008. Dix-huit mois plus tard, la sentence est annulée pour un motif sans aucun lien avec le fond du dossier : la multiplication par plus de sept des indemnités des trois arbitres.

Une victoire à (seulement) 449 000 euros

En août 2016, le tribunal d’arbitrage du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (Cirdi) juge lui aussi la résiliation illégale, rejette également les accusations de corruption, mais refuse de se déclarer compétent pour juger des conséquences de cette résiliation, renvoyant vers la CCJA. Necotrans n’obtient que 449 000 euros, pas de quoi payer les millions d’euros de frais d’avocats engendrés par les différentes actions judiciaires. D’autant qu’en février le groupe français se voit confirmer l’obligation de régler lui-même l’ardoise (270 000 euros) laissée par la Guinée dans le cadre de la procédure CCJA…

Dans cette longue affaire, Necotrans aura donc obtenu l’honneur mais pas l’argent. « C’est vrai que nous n’avons pas touché les sommes que nous souhaitions, mais nous avons été reconnus dans nos droits, et les accusations de corruption lancées contre nous au sujet de l’attribution de la concession du terminal de Conakry ont été rejetées », explique Jean-Philippe Gouyet.

Condamnation de la Guinée à payer 38 millions d’euros

Le groupe conserve toutefois un espoir financier : le principe de l’exécution de la condamnation de la Guinée à payer 38 millions d’euros a été validé par un tribunal français et n’a pas été remis en question par l’annulation de novembre 2015. Cédric Fischer a ainsi tenté de faire saisir plusieurs créances, notamment auprès de l’Agence française de développement, d’Air France ou de Veolia. Sans succès pour l’instant…

Jeune Afrique