pottal_fii_bhantalDans une déclaration de presse en date du 28 Novembre 2016  intitulée « La démocratie guinéenne en danger », Mr.

Mamady Kaba, président de l'Institution Nationale Indépendante des Droits Humains (INIDH) a  demandé le transfert du «dossier du 28 Septembre à la Cour Pénale Internationale (CPI) ou à une juridiction supranationale plus indépendante et plus efficace afin d'assurer la garantie de non répétition de crimes de cette nature et briser le sentiment qu'ont certaines catégories de la société guinéenne d'être au-dessus des lois.»  Pottal-Fii-Bhantal prend bonne note de cette demande émanant du plus haut-responsable de la protection des droits de l’homme au sein de l’administration guinéenne. Cette demande va dans le même sens que les requêtes multiples que nous avons formulées ces dernières années. 

 

Mr. Kaba Mamady vient participer à un mouvement important qui doit être poursuivi avec des actions concrètes de sa part. Parmi elles - du fait de sa position - Mr. Kaba doit adresser une lettre officielle à la CPI pour demander le changement du dossier du 28 Septembre 2009 du statut d’enquêtes préliminaires en une enquête normale. Cette demande doit être assortie de la dessaisie de la justice guinéenne et de l’organisation des procès en Guinée sous les auspices  de la CPI, à l’instar de celui de la Sierra-Léone. Mr. Kaba ne doit pas faire cavalier seul et se contenter d'un appel par voie de presse. Il doit travailler de concert avec les associations de victimes et celles des droits de l’homme - tant nationales qu’internationales. Il faut noter que six ans après la tragédie, la quasi-totalité  des victimes est dans un état d’abandon total. Sans l’habilitation, la dynamisation et la forte mobilisation des victimes, il est impossible d’éviter les risques qu’il a mentionnés. Leur recensement exhaustif doit être une priorité absolue du président de l’INIDH. Mr. Kaba doit compléter son effort par la mobilisation des parlementaires et militants guinéens engagés dans la défense des droits de l’homme. Une telle mobilisation donnera une impulsion supplémentaire à des efforts entrepris notamment par Pottal-Fii-Bhantal, auprès des organisations internationales spécialisées dans la protection des droits de l’homme et l’assistance aux victimes des violences politiques.    

 

La déclaration de Mr. Kaba a été suivie par celle du ministre de la justice qui affirme  qu’“on ne fera l’économie de ce procès”. Dans cette même déclaration Mr. Sako dit que “si on n’a pas d’aide, on ne pourra organiser ce procès en Guinée’’. Comme à l’accoutumée, sur le dossier du 28 Septembre 2009, le ministre de la justice continue ses vagues et changeantes promesses. Le fait de prendre comme exemple le procès de Hissène Habré, pour lequel il fallut une cour internationale de la CEDEAO parce qu’il s’est réfugié au Sénégal est de l’amalgame pure et simple. L’excuse sur la nécessité de l’aide extérieure est inacceptable à plus d’un titre. Rappelons que l’instruction judiciaire qui dure depuis plus de 5 ans a été conduite avec le support de l’Union Européenne. En outre, le gouvernement américain a récemment fait une subvention de 1.4 millions de dollars pour assister le département de la justice. En Avril 2016, Madame Zainab Bangura, représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU sur la violence sexuelle dans les conflits et Madame Sarah Sewall,  sous-secrétaire d’état américain aux droits de l’homme ont  conjointement  promis toute l’assistance nécessaire pour que les procès puissent avoir lieu au plus vite. Leurs exhortations aux autorités sont en soi des signes de manque de sérieux du gouvernement guinéen. À ce jour le ministre de la justice n’a pas de plan d’exécution pour qu’un budget soit présenté aux bailleurs de fonds.

  

Toutefois, malgré leur caractère général et contradictoire, les déclarations de Mr. Mamady Kaba et de Mr. Mohamed Sako – tous les deux garants au plus haut-niveau de la défense des droits de l’homme et de l’application de la justice en Guinée - sont importantes. Elles constituent une confirmation officielle et de fait de l’inadéquation de la justice guinéenne et de son incapacité  à conduire les procès des inculpés. En conséquence,  le principe de complémentarité – qui stipule que l’intervention de la CPI devient nécessaire si le système juridique d’un pays n’est pas capable ou n’a pas la volonté de faire justice -  doit impérativement entrer en jeu.  Par ailleurs, le déni de justice qui dure depuis plus de 6 ans est en soi suffisant pour l’entrée en vigueur du principe.

 

Rien ainsi dans l’avenir ne doit s’opposer  à une saisine et à l’intervention du dernier recours qu’est la CPI.  Les organisations guinéennes de victimes et la société civile - de l’intérieur et de l’extérieur - ont toute la latitude légale pour exercer plus de pression pour que la CPI prenne en charge l'organisation des procès, qui du reste sont essentiels pour  l’éradication de l’impunité chronique qui a détruit les fondements de la nation guinéenne.

 

La commission Centrale de Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon.