compaore_dadisLa classe politique guinéenne, notamment du côté du pouvoir, est stupéfaite. De même que certains observateurs politiques sans doute moins avisés. Alors qu’en politique, il faut s’attendre à tout. Même à l’inimaginable.

L’alliance qui vient d’être scellée entre Celou Dalein Diallo, principal opposant guinéen et Dadis Camara, ex-chef de la junte dont les hommes avaient contribué à tuer environ 150 personnes lors de la marche de l’opposition un 26 septembre à Conakry est pour le moins suspecte et surprenante pour ne pas faire jaser. En effet, Alpha Condé, l’actuel président en Guinée était (l’est-il encore ?) un proche de Blaise Compaoré. Qui l’a soutenu pendant les moments difficiles de sa traversée du désert en tant qu’opposant. Blaise Compaoré, facilitateur dans la crise guinéenne post-électorale ne cachait pas son soutien au président Alpha Condé. Alors contesté par l’opposition. Et l’opposition le savait bien.

 

Quand Blaise Compaoré a accepté de recevoir Dadis Camara qui venait d’échapper à la mort suite à un coup de force à l’interne, l’opposition guinéenne n’avait pas caché elle aussi sa désapprobation estimant que Dadis devrait être remis à la justice de son pays pour répondre des faits qui lui étaient reprochés. Car, en recevant et en offrant gîte et couvert à Dadis, Blaise Compaoré ouvrait ainsi le boulevard du palais de Conakry à Alpha Condé. Et c’est ce qui fut fait. L’opposition n’avait jamais digéré ce qui apparaissait comme un coup de force…démocratique.

 

Le 31 octobre 2014, Blaise Compaoré a démissionné du pouvoir sous la pression populaire. En Guinée, le parti d’Alpha Condé s’est précipité pour « soutenir le peuple burkinabè dans sa lutte », pour la démocratie et la liberté. Ce qui montrait que si les cartes n’étaient pas déjà brouillées entre Blaise et Condé, elles venaient de l’être. Il est évident que les relations entre les peuples vont au-delà des considérations personnelles. Mais, dans ce cas précis, le parti d’Alpha Condé, sans doute avec la bénédiction de celui-ci est allé très vite dans son appréciation de la situation. Blaise parti, Dadis Camara est désormais libre de ses choix. Vraiment ? Tout compte fait, il a choisi de pactiser avec Celou Dalein Diallo de l’opposition. Du coup, Alpha Condé est isolé. Désormais, comme on peut l’imaginer, Dadis Camara va livrer à la place de Blaise Compaoré, son ancien protecteur, le combat que celui-ci devait mener contre Condé qui n’a pas su le soutenir dans la période difficile de démission et d’exil en Côte d’Ivoire. Si ce n’est pas le cas, ça peut bien y ressembler.

 

En effet, même s’il n’est pas rancunier, Blaise Compaoré, comme tout être humain pourrait difficilement concevoir que son ami d’hier (parlant d’Alpha Condé) n’ait pas reconnu les sacrifices qu’il a consentis pour qu’il soit à la tête de la Guinée. C’est un sentiment normal qui peut, dans certains cas, amener à vouloir se venger. Espérons que ce ne soit pas le cas. Ce qui est le cas, est que Dadis Camara, bien populaire en Guinée forestière, fief d’Alpha Condé, pourrait faire pencher la balance du côté de Dalein Diallo en cas de second tour à la présidentielle prévue pour le 11 octobre prochain. Du côté du pouvoir à Conakry, on s’interroge sur une alliance contre-nature en estimant que Dalein Diallo a perdu toute crédibilité. Sans oublier qu’en politique, il n’y a ni de moral ni de crédibilité. C’est quand on gagne qu’on devient crédible. Le duo Dadis - Dalein risque de faire mal.

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