emissaires_alpha_leloumaAprès plusieurs reports, une mission ministérielle conduite par le chef du département en charge de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Baïlo Teliwel Diallo et comprenant le volubile ministre de l’Elevage et des productions animales, Thierno Ousmane Diallo, a passé un mauvais quart d’heure vendredi 5 décembre 2014 à Lélouma.

Officiellement, cette délégation gouvernementale cherchait à comprendre les causes de la crise qui oppose depuis plusieurs mois le préfet Samba Héri Camara à ses administrés qui exigent depuis des mois son remplacement par un autre. En termes clairs, Lélouma ne veut plus du préfet autrement appelé l’enfant prodige de Diâla 2 (une localité de la commune urbaine de Lélouma dont il est originaire).

Attendue depuis 10h du matin par une foule composée de jeunes et de personnes âgées, cette délégation arrive à Lélouma-centre, tenez-vous bien, à 17h 40 ! Selon un membre de la délégation, les ministres ont choisi de faire un détour à Sagalé afin d’accomplir leur devoir religieux en ce jour de vendredi avec le Calife. Mais, le bon Dieu en a décidé autrement. Le cortège ministériel conduit par le gouverneur de la région de Labé, Sadou Keita emprunte une route moins pratiquée à cause de son mauvais état. En plus, la délégation se trompe de chemin, en pleine brousse avant de se retrouver.

Ce retard accusé par les officiels n’entame pas la détermination de la cohorte du mouvement social réclamant le départ de Samba Héri Camara qui attend à la place des martyrs et au stade préfectoral.

La délégation échange avec les autorités locales au siège de la Mairie. A 18h40, elle se résout finalement à aller à la rencontre du mouvement social. Le cortège ministériel fait son entrée dans le stade remonté à bloc. 14 représentants des collectivités rurales et urbaines se succèdent au micro. Chaque orateur réitère la demande au gouvernement du Pr Alpha Condé de «faire remplacer Samba Héri Camara», passé du statut d’enseignant adulé par la jeunesse à celui de préfet détesté et honni par ses citoyens. Du haut de la tribune, chaque représentant accuse nommément le préfet d’être à la base de la division au sein des communautés et de l’émiettement du tissu social à Lélouma.

Quand un émissaire-bavard attise le feu !

Dans ce décor hostile, un émissaire s’empare du micro. Il parle, parle et encore. La foule l’écoute religieusement en guise de respect à la foutanienne. Lui, le ministre de l’élevage, Thierno Ousmane Diallo déclare prendre acte de toutes les accusations formulées à l’encontre du préfet fauteur de trouble. Et que sa délégation est présente à Lélouma pour écouter et aller rendre compte à qui de droit. Mais, laisse-t-il entendre, les membres de la délégation vont devoir passer la nuit pour creuser en profondeur, parce qu’ils ont des questions à poser aux représentants du mouvement social afin de mieux appréhender le fond du problème et savoir bien situer la vérité. Il allonge le discours. Il parle, il parle. Il se répète. La foule prête attention. Il entre dans des commentaires creux. Comme sur un terrain conquis, il aligne les répétitions oiseuses. Le ministre bavard martèle que sa délégation veut faire une mission de travail sérieuse débarrassée de toute erreur d’appréciation, parce que le chef de l’Etat lui a fait confiance en l’envoyant vers les habitants de Lélouma. Et patatras !

Les bla-bla du ministre mettent l’huile sur le feu allumé par les errements de Samba Héri Camara devenu préfet indésirable alors que le décret le nommant avait été hautement salué par la jeunesse locale.

Ainsi que les ressortissants de Lélouma vivant à l’étranger. Le ministre parle. Il aligne. Les propos prétentieux du ministre en charge de l’Elevage dans le gouvernement dit de mission (mais oublieux de faure son bilan trimestriel depuis janvier 2014 !), provoquent l’ire du public. Le ministre persiste. La foule chuchote. Il parle. La foule riposte. Elle lui dit stop. Il reparle. La foule bruit. Elle se fâche et lance des slogans hostiles. Le ministre devient comme un guignol décoiffé. Son boubou blanc alourdit le corps tel un coq mouillé, le bec cloué. Il ne pipe plus mot. Il rentre dans ses petits souliers. La foule se déchaîne. Tout le stade se lève comme un seul homme. Il est hué. Bouche bée dans la tribune officielle.

Le ministre devient la poisse, l’Ebola du moment. Quand il apparaît, ses voisins arrangent leur bonnet et leur babouche de vendredi et, s’éloignent sur la pointe des pieds. Certains d’entre eux se lassent de modestie. Lui font face en se tenant le nez. Ah, monè! (Quel outrage!), on entend des soupirs. Mauvais quart d’heure pour ministre pyromane s’improvisant porte-voix d’une délégation venue pourtant éteindre le feu. La foule charge à nouveau.

Les rabanas marmonnés en liturgie arabe s’entrecoupent de faabêlan, au secours, en poular ! Le ministre Téliwel Diallo, par ordre de préséance, est le vrai chef de la délégation qui devait prendre la parole en lieu et place du volubile ministre de l’Elevage. Il ne peut limiter les dégâts. Téliwel Diallo s’embarque à bord de son véhicule de commandement et file à l’anglaise. Les autres happy few et leurs courtisans décampent aussi à la sauvette.

Toutes les grosses cylindrées démarrent en trombe. Happyend. La foule crie victoire ! A l’image de véritables malpropres voleurs de bétail dans une cité de victimes, voilà comment les membres de la délégation se sont fait prendre à partie à cause des propos irrévérencieux du ministre de l’Elevage.

Diallo Alpha Abdoulaye pour  Le Populaire